Notre salle de jeux familial a souvent accueilli différentes constructions, fréquemment grandes et parfois élaborées, fabriquées à parti...

Kapla : les « planchettes de lutin » de Saint-Louis-de-Montferrand


Notre salle de jeux familial a souvent accueilli différentes constructions, fréquemment grandes et parfois élaborées, fabriquées à partir de planchettes de bois. Des stades de football, des ponts de chemin de fer, des circuits de Formule 1, des gratte-ciel… tout est bon à construire (avant de passer en mode démolition).

La matière première utilisée par mes enfants pour ces projets éphémères est le jeu Kapla, réalisé et distribué depuis un site qui se trouve à Saint-Louis-de-Montferrand, 17 kilomètres au nord de Bordeaux.

Que sont donc les Kapla ? Ce jeu de construction est composé de planchettes en pin de taille unique, dont les proportions sont calculées sur la suite des nombres 1, 3, 5 (1 largeur = 3 épaisseurs, 1 longueur = 15 épaisseurs). Pour être précis, les dimensions de chaque planchette sont 117 mm de long, 23,4 mm de large et 7,8 mm d'épaisseur. Le produit fini est commercialisé en paquets de 40, 100, 200, 280 ou 1 000 et est disponible en couleur naturelle ainsi qu’une petite gamme d’autres couleurs.

À partir de là, le concept est simple car les planchettes peuvent être superposées selon les envies de l’utilisateur. Il n’y a aucun dispositif pour assembler ou fixer les planchettes, et l’utilisation de la colle est fortement déconseillée. Résultat : des possibilités à l’infini et du pur bonheur pour les enfants, comme pour leurs parents et toute autre catégorie d’utilisateur ! Le seul ennemi du jeu, particulièrement lorsqu’on cherche à construire des tours, est la gravité terrestre.

Simple et basique : une planchette Kapla.
Le Kapla, dont le nom signifie « kabouter plankjes » (« planchettes de lutin » en néerlandais), a été commercialisé à la fin des années 1980 par le Hollandais Tom Van der Bruggen. Ce sont les travaux de rénovation sur un château qu’il avait acheté dans l’Aveyron qui étaient à l’origine de son invention. Il voulait réaliser des maquettes afin de matérialiser les idées complexes qu’il avait en tête (pour le plancher ou encore la toiture) mais n'y parvenait pas avec les cubes disponibles sur le marché. Il a donc imaginé ces « planches de lutin ».

Les Kapla à l’œuvre : en équipe avec mon fils Dorian, découvrez ma tentative de construction d’une réplique de la Tour Pey-Berland, lieu incontournable du centre-ville de Bordeaux. Le tout avec, en guest-star, Carlos Puyol du FC Barcelone :


C’est le pin (non traité) des Landes que Tom Van der Bruggen a choisi d’utiliser exclusivement pour la production des Kapla, une variété qui selon la société est « jolie, dense » et dont la résine « le protège en même temps qu'elle donne une stabilité étonnante à une construction ». Alors que l’aventure était encore jeune, il a été décidé d’installer la société relativement près de là où se trouve la matière première, et Kapla a ainsi aménagé dans un ancien chai près des bords de Garonne à Saint-Louis-de-Montferrand. L’entreprise a continué à progresser et se porte toujours très bien aujourd’hui sous la direction du fils de Tom, Jan Van der Bruggen.

L’entreprise distribue environ 350 000 boîtes de Kapla par an en France (pour 50 %) et ailleurs dans le monde. Le procédé de fabrication débute et se termine à Saint-Louis où travaille une quinzaine de personnes. Le bois arrive en grosse planches et est redécoupé en plus petites planchettes. La marchandise part alors vers un site à Tanger au Maroc, où 80 personnes assurent les derniers travaux de précision et de finition. Les Kapla reviennent alors à Saint-Louis avant d’être acheminés.

Le siège de Kapla à Saint-Louis. Il y a pire comme environnement de travail.
Les Kapla font alors leur propre chemin ! En France, c’est direction supermarchés et magasins de jouets, avec pour destinations finales écoles, crèches et maisons de particuliers. En Suède, « early adopter » du jeu (un ancien professeur est devenu le premier importateur du jeu de construction), les Kapla sont vendus directement aux écoles qui les emploient à des fins pédagogiques, et les vendent même aux parents d’élèves.

Le défi Kapla à Lyon
(source : twitter.com/Eurovia_Group)
Les passionnés de Kapla sont à prendre très au sérieux. Prenez par exemple l’histoire d’un Néerlandais qui a utilisé 21 000 planchettes pour construire un Las Vegas en miniature. Ou encore l’équipe d’adultes tout à fait consentants qui a construit une tour haute de 15,57 mètres. En préparant cet article, j’ai appris que des dizaines d’étudiants ingénieurs ont récemment participé à un grand « défi Kapla » à Lyon.

Pour revenir près de Bordeaux et plus précisément à Eysines, la coiffeuse Martine Lohiague, inconditionnelle de Kapla, construit et expose de grandes maquettes dans la vitrine de son salon, avec le soutien de l'entreprise de Saint-Louis. Elle a ainsi réalisé un pont de chemin de fer, des buildings, ainsi que des objets liés aux fêtes de fin d’année. Dernièrement, sa maquette impressionnante du Pont Chaban-Delmas (3 000 planchettes) a fait le sujet d’un dossier dans Sud Ouest. Je me suis rendu au salon pour découvrir sa dernière création, une réplique de la frégate L’Hermione, construite pour marquer la récente Fête du Fleuve. Il aura fallu à Martine 27 heures pour construire le bateau qui compte 3 500 planchettes, sans compter quelques heures supplémentaires pour faire des ajustements.

L’incroyable maquette de l’Hermione, signée Martine Lohiague.
Lors de notre discussion, Martine a dévoilé son prochain projet pour marquer la saison estivale : une réplique des célèbres Cabanes Tchanquées du Bassin d’Arcachon. Je retournerai prochainement au salon de coiffure pour en apprendre davantage sur cette passion, qui fait désormais beaucoup d’émules dans le quartier !

Vous l’aurez compris, Kapla se porte très bien et a gagné ses galons sans tremper dans la machine infernale du marketing ou de la publicité traditionnelle ; l’essor du jeu est un pur produit du bouche à l’oreille au fil des années. Cela étant, l’entreprise a exploré des moyens moins conventionnels pour faire du « buzz », tels que l’édition d’une collection de livres présentant des maquettes originales à reproduire, et la création de « centres Kapla » à Paris, Lyon, Nantes, Nîmes et La Réunion.

En conclusion, on aurait tort de se priver de Kapla, jeu de construction aussi ludique qu’écologique dont l’utilisation est on ne peut plus simple. Et, au-delà des racines néerlandaises de ces planchettes, Kapla est bel et bien une production locale girondine !

Immortalisée à tout jamais : la très réaliste Tour Pey-Berland construite en équipe avec mon fils Dorian pour ce dossier (voir la vidéo ci-dessus). Dans le rôle de la Vierge à l’enfant : Carlos Puyol du FC Barcelone.

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