La couverture jaune et noire si caractéristique du livre « Bordeaux Safari » est facilement repérable dans les librairies à Bordeaux ...

Un tour dans la ville avec Bordeaux Safari pour guide

La couverture jaune et noire si caractéristique du livre « Bordeaux Safari » est facilement repérable dans les librairies à Bordeaux et aux alentours. Son éditeur, Deux Degrés, m'a récemment contacté en me demandant de parler de ce « guide jouable » sur le blog. La demande me semblait pertinente ; j’ai donc souhaité faire passer au livre un test grandeur nature en espérant obtenir des résultats intéressants. 

La promesse de Bordeaux Safari est qu'il s'agit du « guide dont vous êtes le héros ». Le lecteur devient en effet le personnage principal et le livre sert de cadre à un jeu de rôle interactif qui le promène de lieu en lieu à travers Bordeaux. Et c'est ainsi que j'enjambai mon vélo jaune tôt un dimanche matin, sans trop savoir où le guide allait m'amener.

Il y a diverses manières d’utiliser le livre : on choisit son point de départ selon l’horaire ou encore selon un désir spécifique. Pour ma part, je choisis l’option « GPS » et sélectionnai un quartier qui ne m’est pas une destination habituelle, « Bordeaux Sud », à savoir la page 43 du guide.

Je me retrouvai donc sur le cours de la Marne, déjà très animé grâce aux nombreux passants venus faire leurs courses au marché des Capucins. Ce Bordeaux-là est nettement plus populaire et moins lisse que le centre historique de la ville. Le livre m’invita à observer les « boutiques de coiffure, épilation et tresses africaines ». J’en vis deux qui étaient fermées, mais peu importe car mes cheveux sont peu adaptés aux tresses africaines... Je me dirigeai alors vers le cours de l’Yser pour y découvrir un bar-restaurant portugais conseillé par le guide : le Contraste.

Les lecteurs les plus fidèles savent déjà que le blog aime mettre en avant les salons de coiffure.
La petite terrasse sur le trottoir du cours était entièrement occupée par d’impressionnants messieurs, mais à l’intérieur de nombreuses places étaient à prendre. Je m’y installai et commandai un espresso. L’environnement était peut-être portugais, mais ce café à 1,10€ semblait sortir directement d’un film Truffaut bien français des années 1960, comme quoi ces espaces hors du temps existent encore dans un monde de plus en plus dominé par Nespresso ou Starbucks. Regardant autour de moi je vis un vieux babyfoot et des affiches au mur annonçant les gains de clients du bar au jeu Amigo de la Française des Jeux. Je récupérai un bulletin et dois désormais cocher les sept cases qui me permettront de figurer également au mur à l’avenir. Enfin, la télévision ne diffusait pas un match Porto-Benfica comme le promettait Bordeaux Safari, mais plutôt un clip de Britney Spears sur la chaîne MCM.

Dans Le Contraste. Ne pas s’attendre à des gobelets en plastique où son nom est écrit au marker.
Le guide m’envoya alors à la page 11 et vers le palais Gallien. Ce n’était pas la porte à côté mais je n’avais d’autre choix que celui de me rendre aux vestiges de l’amphithéâtre gallo-romain de Bordeaux. Un petit marché était installé sur le parvis ; les camelots ont été délogés de la rue Fondaudège où d’importants travaux sont en cours sur l’installation de la quatrième ligne de tramway. Le secteur semblait en tout cas plus vivant que jamais, même si la vue des ruines historiques fut moins dégagée que d’habitude pour les passagers du petit train touristique, qui s’arrêta bien 30 secondes devant le lieu, le temps d’écouter l’enregistrement d’un très court descriptif historique de l’arène.

Près du Palais Gallien, il vous faut imaginer l’odeur des poulets rôtis qui va avec.
Il était néanmoins sympathique de voir converger, pendant quelques secondes, mon safari bordelais et l’itinéraire touristique officiel de la ville. Le livre me renvoya alors vers le centre-ville et, plus précisément, vers la place de la Victoire afin d’admirer la « faune » locale. 

La « faune » en question n’était autre que les deux tortues en bronze signées par l’artiste tchèque Ivan Theimar. Visiblement, elles sont très appréciées des touristes comme des locaux. M’installant quelques minutes, je pus admirer de loin toute la longueur de la rue Sainte-Catherine, et cette pause permit de me rappeler combien la population de la Victoire est diversifiée : des papas avec des poussettes, des mamans accompagnées d’enfants en bas âge, des jeunes, des moins jeunes, des personnes qui trainent sans motif particulier, des personnes qui portent des courses, d’autres qui portent des planches de surf, des joggeurs qui portent des baguettes de pain. Le tout me faisait penser au vers d’une chanson de Divine Comedy : « all human life is here ». (À noter, The Divine Comedy sera de passage au théâtre Fémina au mois de février 2017.)



C'est donc avec une mélodie des Divine Comedy en tête que je me rendis à mon prochain arrêt : la place Sainte-Croix. Je fus séduit par la promesse formulée par le guide d'un apéritif agréable à l'ombre des platanes, mais sur place aucun bar n'était ouvert. Je me contentai à la place d'étudier la programmation affichée par le TnBA (Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine) avant d'admirer la façade spectaculaire de l'abbatiale Sainte-Croix... tout en faisant le maximum pour ne pas me laisser distraire par l'arrivée d'un deuxième cycliste qui soulagea une envie pressante sans chercher à s'isoler. Mémo pour Alain Juppé : prévoir davantage de toilettes publiques à travers la ville.

La proposition suivante de Bordeaux Safari se trouvait à proximité : le Café Pompier que Google m'informa par la suite être un café / bar / salle de concert géré par des étudiants de l'école des Beaux-Arts. Une fois de plus, manque de chance, mon heure d'arrivée n'était pas en phase avec les horaires d'ouverture du lieu. Je pris néanmoins le temps de prendre quelques photos de l'inscription au-dessus de la porte d'entrée, rappel de la vie antérieure du lieu et origine du nom de l'établissement actuel.

Devant le TNBA et quelques traces du passé du Café Pompier (poste de secours contre l'incendie).
Je passai alors de la page 39 à la page 16, direction l’Utopia, l’incontournable cinéma d’arts et essais qui connut déjà par le passé son heure de gloire sur le blog. Cette fois-ci, je n’avais pas le projet de voir un film, mais j’entrai afin de décider lequel me tenterait le cas échéant. (En l’occurrence, j’aurais choisi de voir « Sud », documentaire réalisé en 1998 sur un meurtre raciste commis dans le Deep South des États-Unis.)

Bordeaux Safari me proposa alors deux options : viser une boîte de nuit ou assister au débat avec la réalisatrice du film. Je choisis la deuxième option. Me voilà dirigé vers la page 84 et un verdict inattendu, à savoir le mot « Perdu » écrit en grand et la conclusion : « Une journée sans. Tu as fait de mauvais choix qui ont causé ta perte ». Il ne me reste plus qu’à rejouer !

Game over devant l’Utopia.
Mais cette conclusion n’était pas la bonne car ce n'était pas une journée « sans » : le temps passé en compagnie de Bordeaux Safari fut loin d’être un échec ! Le véritable atout du livre est qu’il amène le lecteur en dehors de sa zone de confort. Les descriptifs des lieux, pleins de clins d’œil pour les Bordelais, seraient presque des détails ; ce qui prime est l’usage de ces lieux qu’en fait le lecteur une fois sur place. 

Personnellement, entre les différents points de visite, mon safari bordelais d’un dimanche matin m’amena hors des sentiers battus, à travers des marchés aux puces, le long de ruelles à paves et vers de petites places où les voitures étaient garées en double file à l’ancienne. Le cheminement quelque peu tordu me permit également de découvrir de belles enseignes en mosaïque et un surprenant bâtiment qui était anciennement lieu de « justice de paix » (désormais le bureau des objets perdus de la ville de Bordeaux).

Surtout, ce guide permet de s'immerger dans le Bordeaux populaire, le Bordeaux authentique qui vit et respire à 100 %, et un Bordeaux qui ne figure pas forcément sur des cartes postales ou dans un dossier publié par un énième hebdomadaire national. Et rien que pour cette raison-là, Bordeaux Safari est approuvé par Invisible Bordeaux. 

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